Le Vatican et les Salésiens : des liens étroits
31 juillet 2013
Le pape François, salesianissimo ! Ça a évidemment été l’événement le plus marquant de ce début 2013 : un pape qui démissionne, un autre qui arrive de « l’autre bout de la terre »… On n’avait jamais vu ça. L’occasion pour DBA de revenir sur les liens entre le Vatican et les Salésiens, et entre ce pape argentin et les fils et filles de Jean Bosco.
Jean Bosco et les papes, voilà une histoire ancienne : « J’ai demandé à Mgr Cagliero de dire au Saint Père que les Salésiens ont pour objectif spécial de soutenir l’autorité du Pape, partout où ils se trouvent, partout où ils travaillent », dit un jour le Turinois. Les papes le lui rendirent bien : Pie IX l’exhorta à créer une congrégation et lui prodigua de nombreux conseils. Son successeur, Léon XIII, accepta de devenir le premier coopérateur salésien. Mais, Jean Bosco et le pape, c’est aussi une histoire de l’an 2013. Récit…
Acte 1. Le conclave
En ce 12 mars, alors que les cardinaux pénètrent dans la chapelle Sixtine, ils ne sont que dix-sept à être issus des rangs d’un ordre religieux, d’une congrégation. Dix-sept religieux parmi 115 cardinaux électeurs, voilà qui est peu. C’est pourtant l’un d’entre eux, un jésuite, qui, le lendemain, apparaîtra au balcon de la loggia… Reste que, parmi ces 17 religieux, ce ne sont pas les jésuites qui sont les plus nombreux… mais les Salésiens de Don Bosco (4 représentants), devant les franciscains (3), les jésuites et les dominicains (2 chacun). Qui sont ces quatre salésiens ? Il y a d’abord, si l’on respecte l’ordre alphabétique, Mgr Angelo Amato, 74 ans, un homme de la Curie, préfet de la Congrégation des Causes des Saints et qui fut auparavantsecrétaire de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Autrement dit, unproche de Benoît XVI.
Deuxième italien: Tarcisio Bertone, 78 ans. Ce Piémontais (comme Jean Bosco) est, lui aussi,unfidèle et untrèsproche de Benoît XVI. Ilest en effetsecrétaired’Etat du Saint-Siège, autrement dit « Premier ministre » du pape. A cetitre, il fait partie de ceuxqui ont dûs’expliquersur les dysfonctionnements de l’administrationromaine.
Troisième Salésien (et troisième Italien !), Mgr Raffaele Farina, 79 ans, est entré dans la congrégation à l’âge de 16 ans ! Il a longtemps été enseignant de théologie à l’Université Pontificale Salésienne (UPS) et est depuis 2007 archiviste et bibliothécaire du Vatican.
Enfin, quatrième cardinal électeur, un représentant de l’Amériquelatine : Mgr Oscar Rodriguez Maradiaga. L’archevêque de Tegucigalpa (Honduras) depuis… 1978 est le plus jeune des quatre cardinaux salésiens (il a 70 ans). A la tête de Caritas Internationalis (leSecourscatholique, en France) depuis 2007, c’est un homme qui compte dans l’Eglisecatholique, sur tous les continents. Unevoix écoutée.
Tous les quatre entrent dans la chapelle Sixtine en tant que cardinal. Et c’est comme cardinal qu’ils en ressortent, à la différence de Jorge Mario Bergoglio. Un jésuite qui choisit un prénom franciscain… et qui connait bien les salésiens.
Acte 2. Le pape François
Dans les jours qui suivent son élection, les liens entre le pape François et la famille salésienne sont en effet rendus publics. On découvre d’abord que le nouveau pape a été marqué par la figured’un salésien coadjuteur (un frère, non ordonné prêtre), Artémide Zatti. « En 1976, témoigne Jorge Mario Bergoglio, les jésuites d’Argentinen’avaient plus de vocation de frère coadjuteur et nous pensions que la situaton était irréversible. »
En 1976, un évêque parle au père Bergoglio de M. Zatti. « Il me donna à lire sa biographie. Son profil quasi parfait de coadjuteur retint mon attention. A ce moment, je sentis que je devais demander à Dieu, par son intercession, de nous envoyer des vocations de coadjuteurs. Je fis des neuvaines… » Dans les années qui suivirent, dix-huit jeunes entrèrent au noviciat. « Les novices, les étudiants et les jeunes coadjuteurs ont fait plusieurs fois la neuvaine en l’honneur de M. Zatti, pour demander des vocations. Moi-même, je l’ai faite (…) Je répète que je suis convaincu de son intercession », raconte encore le pape argentin.
Un autre lien est découvert : « Le nouveau pape est un ancien élève salésien » écrit le 19 mars l’Agence Infos Salésiennes (ANS), depuis Rome. « En 1949, Jorge Mario Bergoglio fréquenta avec son frère le pensionnat salésien Wilfrid Baron de Ramos-Mejia. » On retrouve même trace d’un premier prix en conduite et en religion et évangile.
Dans la foulée, les Salésiennes de Don Bosco de Thaïlande annoncent que parmi celles-ci, se trouve une missionnaire argentine qui n’est autre que… la cousine du pape, sœur Ana Rosa Sivori. « La dernière fois que je l’ai vue, c’était l’année dernière, témoigne-t-elle. J’étais revenue à la maison pour visiter mes parents et je suis allée le rencontrer comme je le faisais toujours quand je revenais en Argentine. Nous avons bavardé un peu et puis il m’a donné des livres pour moi et pour les sœurs et, comme toujours, il m’a demandé des prières. Il m’a demandé de prier pour lui. Il me disait toujours: « Ana Rosa, prie pour moi, rappelle-toi de prier pour moi ».
Quelques jours plus tard, le recteur majeur des Salésiens, le père Pascual Chavez, est reçu en audience au Vatican. « Nous avons rappelé quelques évènements qui marquent ses liens avec la spiritualité et l’oeuvre salésienne : quand à Aparecida, il demanda à ce que la béatification de Zeffirino Namuncurà n’eut pas lieu à Buenos Aires mais à Chimpay, motivant sa requête par l’explication : ‘En Patagonie, les salésiens ont tout fait’; son passé d’élève du Pensionnat salésien de Ramos Mejía; sa dévotion à Marie Auxiliatrice, qu’il exprimait en se rendant à son Sanctuaire, à Almagro, le 24 de tous les mois pour célébrer l’Eucharistie; il a lui-même rappelé que le père Enrique Pozzoli, toujours un salésien, l’avait baptisé précisément dans ce Sanctuaire; et nous avons même parlé de son affiliation au Club de Football San Lorenzo (photo de Une), dont il conserve la première carte d’adhérent », raconte le père Chavez.
Acte 3. Les Salésiens du Vatican
En ce début d’été, quatre mois après l’élection du nouveau pape, qu’écrire aujourd’hui ? François a répondu par un enthousiasmant « Pourquoi pas ? » à l’invitation du père Chavez de venir célébrer les 200 ans de la naissance de saint Jean Bosco à Turin, le 24 mai 2015, à l’occasion de la fête de Marie Auxiliatrice. Son agenda lui permettra-t-il de le faire ? L’avenir le dira.
En attendant, la famille salésienne demeure présente dans l’entourage du pape, dans les services centraux de l’Eglise. Nous avons déjà évoqué les quatre cardinaux du conclave. Mais d’autres salésiens servent au Vatican.
Savez-vous, ainsi, que c’est un Salésien qui est directeur de la chapelle Sixtine ? Le père Massimo Palombella est un Turinois de 46 ans. S’il est docteur en théologie dogmatique, il est aussi diplômé en musique chorale et en composition. Avec le chœur inter-universitaire de Rome, il a à son actif de nombreux concerts en Italie et dans le monde.
Savez-vous que c’est un Salésien qui est secrétaire (autrement dit n°2) de la congrégation pour l’évangélisation des peuples ? « C’est une excellente nouvelle que d’avoir un homme de cette qualité à un tel niveau au Saint-Siège et qui comprend aussi bien la situation des catholiques de Chine » avait réagi à sa nomination un prêtre de Hong-Kong. Le Père Savio Hon Tai-Fai, 63 ans, est entré chez les Salésiens en 1975. Il parle le cantonais, le mandarin, l’anglais, le français. « Il jouit d’un grand respect au sein du clergé chinois et c’est un homme d’écoute ».
Savez-vous qu’une Fille de Marie-Auxiliatrice, sœur Lucia Fedrigotti, travaille au sein de la congrégation pour les instituts de vie consacrée ? Elle y est la représentante officiellede cette instance, auprès des conférences nationales des Supérieur(e)s Majeur(e)s. Un poste important.
Alors évidemment, depuis sa création, la société Saint-François de Sales, nom qu’a donné Jean Bosco à sa congrégation, n’a pas pour objet de remplir les bureaux du Vatican. Son charisme, celui des sœurs salésiennes également, comme de toute la famille salésienne est de servir d’abord les jeunes du monde entier, quelle que soit leur religion. Pour éduquer en évangélisant. Pour évangéliser en éduquant. Sûr que le nouveau pape ne peut que bénir une telle mission…
Reportage réalisé par Benoît DESEURE
1er aout 2013
CREMISAN : UNE MAISON SALESIENNE
ET UN DOSSIER PAPAL
Que se passe-t-il à Crémisan ? Les autorités israéliennes ont décidé d’y construire le fameux «mur», visant à séparer Israël de la Cisjordanie. Seulement, ici, le « mur de l’apartheid », comme l’ont appelé les Palestiniens, doit séparer Bethléem, Beit Jala et les villages voisins de la vallée de Crémisan qui vont basculer du côté israélien de la clôture. Une vallée où se trouvent notamment des œuvres salésiennes.
Les salésiens du Moyen-Orient ont demandé à ce Tribunal que le mur de division ne coupe pas leur propriété : «Votre élection nous a apporté l’espérance que les choses changeraient. Nous avons encore espoir».
DU PAPE A MISS FRANCE,
DES ANCIENS ELEVES CELEBRES
En France et en Belgique, on compte beaucoup d’ « anciens de Don Bosco » célèbres. Normal, pour un réseau congréganiste qui, de Pouillé à Nice, de Liège à Landser, accueille chaque année 35 000 jeunes.
Certains le sont par le sport, comme les nageurs niçois Yannick Agnel ou Camille Muffat, médaillés aux JO de Londres ou comme le coureur cycliste Axel Merckx, ancien du collège Don Bosco de Woluwé-Saint-Lambert, à Bruxelles.
D’autres le sont par la musique ou le chant, comme Nicole Grisoni, ancienne de Thonon, plus connue sous le pseudo de… Nicoletta. Ou Roger Allen Jouret, ancien de Woluwé lui aussi, et qui connut en 1978 un extraordinaire succès avec « Ça plane pour moi » : Plastic Bertrand.
Mais la célébrité, c’est aussi par exemple le titre de miss France 2013, remporté par une (très belle, évidemment) ancienne élève de Landser, Delphine Wespiser. Ou le duo comique belge Les Frères Taloche : Bruno et Vincent (leurs vrais prénoms) ont été scolarisés chez les salésiens à Don Bosco-Verviers et ont obtenu en 2005 le prestigieux prix Raymond-Devos.
On pourrait évidemment rallonger la liste pendant des pages, de Jacques Delors (Patronage Saint-Pierre, à Paris) à Mgr Jacques Gaillot (ESTIC Saint-Dizier), du ministre belge Didier Reynders (Don Bosco Liège) à Bruno Dumont (Grand Prix du jury à Cannes 1999, de Bailleul), de l’écrivain Alain Mabanckou (prix Renaudot 2006, ancien de Pointe-Noire) à Mgr Pierre Pican, l’évêque émérite de Bayeux-Lisieux (ancien de Giel). Mais la place manque. Alors, résumons : du pape à miss France, la liste est longue, et variée. Et celui que l’on préfère, c’est le premier de tous, passé de la célébrité à la postérité : saint Dominique Savio !