Quand éduquer prime sur enseigner
14 janvier 2016
En Belgique francophone, douze écoles portent les valeurs de Don Bosco. Pour en témoigner, Eric Vanderstukken, directeur de l’école fondamentale Don Bosco à Liège et Benoit Goffin, directeur du collège Don Bosco à Woluwe-Saint-Lambert, livrent leur expérience.
Que retenir de la pédagogie de Don Bosco et de son message ?
Benoit Goffin : Le message de Don Bosco se résume par sa pédagogie de la prévention. Son but est de rendre le jeune autonome dès que possible. Don Bosco voulait donner aux jeunes en difficulté des outils pour qu’ils puissent se débrouiller dans la vie, trouver leur chemin. Il ne s’agit pas de dire où ils doivent arriver, mais d’aller les chercher là où ils sont et de voir jusqu’où on peut les conduire dans l’excellence d’eux-mêmes.
Eric Vanderstukken : Trois regards sont posés sur le jeune, sur l’enfant, mais aussi sur le collègue, le directeur, le président du Pouvoir Organisateur (autre nom, en France, du chef d’établissement)… D’abord, un regard d’affection. On a besoin d’être sécurisé, de trouver sa place, d’être connu et reconnu. Ensuite, un regard de confiance, quand quelqu’un arrive à l’école. Et puis, un regard d’espérance. Dans une école salésienne idéale, aucun éducateur ne peut désespérer d’un enfant ou d’un collègue, de sa direction. Le projet doit être mené jusqu’au bout. On se bat pour essayer de provoquer chez l’enfant cette recherche de l’excellence. L’important, dans l’éducation salésienne, est de ne pas enfermer la personne… Même si cela a été dur jusque-là, on peut toujours essayer de repartir sur autre chose. Cela nous fait évoluer, nous apporte une force, dans la vie et dans le métier.
Et quelles sont les attitudes concrètes que suscite cette pédagogie ?
Benoit Goffin : C’est une pédagogie de la joie, de la confiance et de la solidarité. À notre époque, anxiogène et hyper connectée, l’important est de proposer des activités qui donnent de la joie. Nous développons notamment une activité théâtre. Le but est de faire en sorte que les jeunes se rendent compte que l’éducation humaine prime sur l’éducation scolaire. Le plus important est l’apprentissage de la vie en commun, la vie avec les autres. Et notre écoute des jeunes est inconditionnelle.
Eric Vanderstukken : Il s’agit même d’apprendre qui est l’autre, qui est différent de moi. Lui porter de l’intérêt, avoir confiance en lui, lui laisser de la place… On peut faire cet apprentissage-là à l’école. Chez nous, éduquer prime sur enseigner. Nous avons décidé d’institutionnaliser ces valeurs, de continuer à les développer. C’est un ilot de résistance !
« Comment voulez-vous standardiser
une relation d’éducateur à éduqué ?
C’est impossible ! »
Quel type de projets menez-vous dans vos écoles, en lien avec ces valeurs ?
Eric Vanderstukken : Il s’agit surtout d’une attitude quotidienne. On utilise une méthode d’écoute, les gens peuvent déposer leurs soucis, la parole est sécurisée. J’accorde une attention particulière aux enseignants. Je souhaite voir aussi chez les adultes les valeurs qu’on développe chez les enfants.
En quoi est-il important de fêter le bicentenaire de Don Bosco cette année ?
Benoit Goffin : Ce qui est important, c’est que nous sommes passés d’une école congréganiste tenue par des religieux à une école organisée et gérée par des laïcs. Il y a des intuitions de départ, qu’il faut changer, adapter à la société.
Eric Vanderstukken : Don Bosco a dit : « J’ai fait le brouillon, vous mettrez les couleurs ! » Il a l’intuition de nous donner des lignes directrices, qu’il faut ensuite incarner. Comment voulez-vous standardiser une relation d’éducateur à éduqué ? C’est impossible !
Benoit Goffin : Le piège potentiel du bicentenaire serait de contempler l’icône, de la vénérer, alors qu’il ne s’agit que d’une image qui doit renvoyer au travail qui doit être fait, inventé… Il faut être prophétique !
Concrètement, qu’avez-vous organisé dans vos établissements à cette occasion ?
Benoit Goffin : Nous sortons du cinquantenaire de notre école, et ce que nous avons présenté lors de la journée du 23 octobre c’est ce que nous avons vécu au moment de la célébration de notre cinquantenaire.
Eric Vanderstukken : On a senti qu’il fallait commencer à mieux prendre soin du groupe adulte et de ce qui se passait sur le plan relationnel. Le bicentenaire a servi de marchepied symbolique pour pouvoir inclure cette dimension dans le nouveau projet d’établissement. Le 23 octobre, nous avons présenté une chorale avec tous les collègues, les membres du PO. Nous avons chanté une chanson créée par notre équipe, qui mettait en valeur notre projet. J’en retiens ces paroles : « Et si on travaillait comme on ne l’a jamais fait ! »
Extrait de la revue Entrées Libres, la revue de l’Enseignement catholique belge
Site Internet : enseignement.catholique.be
www.entrees-libres.be
14 janvier 2016
Le bicentenaire : un tremplin !
À l’occasion du bicentenaire, le réseau Don Bosco a organisé des temps de réflexion et des festivités tout au long de l’année. Isabelle Rosière, coordinatrice de l’équipe «Bicentenaire », nous en propose un bref écho.
« C’était l’occasion d’un nouveau souffle, de remettre à jour les valeurs de Don Bosco, d’en discuter, de les mettre en œuvre. Différents moments ont été programmés. Une exposition de photos sur la pédagogie de Don Bosco a été réalisée par des étudiants de Saint-Luc ; une comédie musicale a été présentée au Collège Don Bosco de Woluwe-Saint-Lambert, avec des jeunes de Belgique et de France. Et bien sûr, on a lancé le Défi citoyenneté 2025. Toutes ces initiatives ont eu comme évènement-phare la journée pédagogique organisée le 23 octobre au Théâtre Saint-Michel à Bruxelles, qui a rassemblé nos douze écoles, représentées par plus de mille personnes.
Un travail sur le thème de la relation a été mené en guise de préparation à cette journée. Chaque école a pu partager sur scène un talent sur ce thème.
Cela a généré une dynamique très forte, et on compte bien continuer à alimenter cette réflexion dans les années à venir ! »
Pour aller plus loin
Le 23 octobre, des pratiques à partager à Bruxelles
En Belgique : « La relation avant tout »