Jean-Marie Petitclerc : « certains jeunes vivent mal Noël »

10 décembre 2017

Bientôt Noël, les rues et les maisons s’illuminent ! Il est temps de réfléchir à la fête, avec amis, famille, belle-famille… L’effervescence est au rendez-vous ! Pourtant, c’est l’une des périodes les plus difficiles pour les jeunes en institution. Voici le témoignage de Jean-Marie Petitclerc, qui durant 30 ans a dirigé des institutions sociales salésiennes.

 

Jean-Marie Petitclerc 

Jean-Marie Petitclerc, salésien de Don Bosco, prêtre, polytechnicien et éducateur, a été fondateur et directeur pendant 20 ans de l’association « Le Valdocco » 

« Quand tu vois tous les gens faire la fête, et que toi t’as le cœur gros comme ça de n’être invité chez personne de ta famille, alors, pour toi, Noël, c’est la pire des journées », me confiait Mickaël du haut de ses 13 ans.

Pour beaucoup d’enfants, Noël, c’est la plus belle fête de l’année, avec les décorations de la maison, les repas de famille et les cadeaux au pied du sapin ou de la cheminée. Mais pour d’autres, qui n’ont personne chez qui la fêter, c’est une journée bien sombre, où l’on ressasse la douleur de ne pas être aimé comme on le souhaiterait !

Seul dans l’établissement

Me reviennent en mémoire tant de Noëls passés dans les maisons d’enfants à caractère social que j’ai dirigées. Je prenais souvent la permanence afin de permettre aux éducateurs de l’équipe de retrouver leur famille. Je m’étais efforcé, durant les semaines précédentes, de contacter toutes les familles afin de voir où chaque enfant pourrait passer Noël. Et il en restait toujours deux ou trois pour lesquels je n’avais trouvé aucune solution. Et c’est dur, cette nuit-là, de se savoir attendu par personne, ni parent, ni grand frère ou grande sœur, ni oncle ou tante, ni papy ou mamie ! Certes, des familles voisines se proposaient de les accueillir. Mais eux ne le souhaitaient guère, ne se sentant pas de partager un moment de fête avec une famille unie et joyeuse alors que leur cœur était triste à mourir. Ils préféraient encore pouvoir exprimer leur souffrance au sein de l’établissement.

Des décorations factices

Une année, j’avais accueilli en urgence un jour de Noël un adolescent venant d’un autre établissement, qui, ne supportant pas le caractère qu’il jugeait factice des décorations qu’une éducatrice stagiaire plaçait sur la cheminée, avait envoyé dans l’âtre une petite bonbonne de gaz qui, en explosant, avait blessé ceux qui se tenaient à proximité. Derrière les actes de violence commis cette nuit-là se cache bien souvent une grande souffrance !

Trouver une parole juste

Une autre année, un seul enfant était présent, et il accepta la proposition de se rendre à la messe de minuit. Je m’installe à côté de lui dans l’assemblée. Et j’entends encore les paroles du célébrant, qui ne cessait de parler avec emphase de l’amour réunissant les familles cette nuit-là. Je sentais le visage de mon petit voisin se décomposer. Pas une parole pour les personnes isolées qui souffrent tant en cette nuit ! Alors, au retour, j’essayais de trouver des mots pour dire à l’enfant que je raccompagnais à la maison combien ce Jésus, dont on fêtait la naissance aujourd’hui, l’aimait, même s’il se sentait abandonné par ses proches. Mais, Seigneur, qu’il est difficile de trouver les mots justes face à l’enfant qui souffre !

 

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