Construire l’Europe aux yeux des jeunes
20 mai 2019
Ils n’étaient pas encore nés lorsque la Communauté Economique Européenne a été créée en 1957. Ils ont entre 20 et 30 ans. Pablo est espagnol, Antonija croate, Anne-Florence française. Engagés dans le Mouvement Salésien des Jeunes au sein de leur pays et au niveau de l’Europe, ils nous partagent leur vision de l’Europe et ce que le « vieux continent » apporte à leur pays.
Europe, qui es-tu ?
Pablo fait partie de l’équipe coordinatrice du Mouvement Salésien des Jeunes pour l’Europe depuis novembre dernier. Il partage ses convictions, vues du côté espagnol.
Pour l’Espagne, l’intégration européenne représente un progrès notable. D’un point de vue économique, bien sûr, puisque cela a permis l’arrivée d’un volume d’argent considérable pour les investissements dans les infrastructures, l’amélioration de la production agricole…
Nous devons souligner l’augmentation considérable des échanges culturels, notamment à travers le programme Erasmus, qui est particulièrement bénéfique pour les jeunes. Grâce à ce programme, les étudiants étrangers ont été encouragés à étudier dans différents pays européens. Un pays comme l’Espagne, égoïste au siècle dernier, a étendu ses frontières et peut être considéré comme plus européen que jamais, bannissant les clichés de toutes sortes sur l’identité espagnole. De même, l’Espagne a également contribué -vu sa taille et sa population – à la construction de l’Europe. Tout cela est devenu évident avec les élargissements qui ont eu lieu depuis 2005, avec l’entrée de nouveaux pays qui, selon le principe de solidarité, doivent être aidés de la même manière que l’Espagne l’était en son temps. Depuis lors, nous sommes devenus un pays qui, en première ligne, a contribué à l’effort d’intégration. Continuons à l’être en ces temps difficiles, sans nous laisser emporter par les vents du changement.
Je constate aussi que nous vivons une « Europe à deux vitesses », avec un Nord très industrialisé et une économie puissante et un Sud au taux de chômage élevé. Les pays méditerranéens sont en première ligne et laissés seuls pour faire face à l’accueil des migrants.
L’Europe a besoin de retrouver son idéal humaniste, et de se donner une priorité autre que le confort matériel, économique et technologique. Je n’oublie pas les paroles de Jean Paul II à Saint-Jacques-de-Compostelle, le 9 novembre 1982 : « Europe, retrouve-toi, sois toi-même ». Il s’agit de renouer avec les racines de plus en plus oubliées d’une Europe chrétienne. Il est absurde de vouloir effacer les traces d’un passé profondément lié au christianisme : l’idéal de liberté né de la culture gréco-romaine s’est nourri du précepte évangélique de l’amour développé par de grands penseurs chrétiens. »
Des valeurs pour l’Europe
Antonija est croate. Dans la construction européenne, elle souligne l’importance des relations entre personnes et rappelle les valeurs fondamentales.
Mon pays, membre de l’UE depuis 2013, est considéré comme l’un des retardataires de l’Union… L’entrée dans l’UE a eu un impact significatif sur le plan économique, surtout pour les exportations dans les autres pays membres. Les fonds structurels européens ont permis de réaliser quelques grands projets. Par exemple, la construction du pont de Pelješac, qui relie deux parties du pays. Néanmoins, la libéralisation n’a pas permis une amélioration significative de la situation économique. Les attentes étaient considérables, la déception est forte. Nous avons été dépassés par une montagne de normes et de juridictions nouvelles auxquels nous n’étions pas préparés. Selon moi, nous n’étions pas prêts à devenir membres de l’UE.
Ce que la Croatie peut apporter à l’Europe
Au-delà de cela, je pense que la Croatie peut offrir beaucoup à l’Europe : elle garde des valeurs perdues comme celles de la famille, de la foi, de la communauté. Elle fournit des travailleurs sérieux, fiers de l’effort. Mais comment garder cette identité, quand l’Europe tend à réduire tous les pays sous un dénominateur commun ?
Comment construire l’Europe ?
Un des problèmes majeurs en Europe et en Croatie est celui des jeunes sans travail. Comment se projeter dans l’avenir, fonder une famille ? Cette incertitude qui flotte dans l’air engendre une jeunesse à la dérive. L’Europe est dure pour les pays qui ne réussissent pas à émerger. Elle semble le lieu de la compétition globale. Sa tradition humaniste devrait lui faire retrouver une tradition davantage solidaire et généreuse.
L’étoffe de la fraternité
Anne-Florence, présidente du Mouvement Salésien des Jeunes, travaille dans un cabinet de conseil sur Paris.
« Mon travail m’invite, au quotidien, à impulser des dynamiques au sein des organisations dans lesquelles je suis envoyée, par la création de liens et d’interactions entre les collaborateurs qui les composent, pour accompagner les transformations stratégiques et managériales.
L’Europe est pour moi une arme pacifique féconde pour crier cette volonté de créer des liens de fraternité entre différents peuples aux cultures multiples. Au cours de mon engagement au sein de l’équipe coordinatrice du Mouvement Salésien des Jeunes pour l’Europe, j’ai pu goûter à cette précieuse fraternité qui dépasse les frontières, cette communion fertile où chaque individu à une place sacrée. Cependant, nous aurons beau tisser des liens au-delà des frontières, si nous ne les nourrissons pas, ils s’effilochent et ne perdurent pas. Pour faire vivre partout ces liens réels et véritables, prenons le temps de tisser, avec patience et persévérance, l’étoffe de la fraternité dans l’atelier terrestre du Créateur… »
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