Mgr Hervé Giraud rend hommage à Xavier Thévenot (4/4)
24 juin 2014
Hervé Giraud rend hommage à Xavier Thévenot, théologien et humaniste salésien. Hervé Giraud est l’évêque de Soissons, Laon et Saint-Quentin ; il répond plus spécifiquement à la question de l’apport de la théologie morale de Xavier Thévenot pour la conduite pastorale d’un diocèse. DBA lui donne la parole.
« Autrement dit…» : c’était tout l’aspect éducatif de Xavier Thévenot
« Autrement dit » telle était l’expression de Xavier Thévenot que j’avais retenue pour ma thèse… qui ne vit jamais le jour ! Xavier l’employait souvent et elle me sert désormais quotidiennement, depuis plus de dix ans, dans mon ministère épiscopal. Par sa connaissance des sciences humaines, ce salésien avait le don de rendre accessibles des vérités morales, pastorales ou spirituelles. Comme évêque je pense souvent à cet « autrement dit » pour exprimer la foi avec les mots, les images, les événements d’aujourd’hui. C’était tout l’aspect éducatif de Xavier, si essentiel dans une mission épiscopale dont l’autorité n’a pour but que de faire grandir dans le Christ.
Xavier Thévenot parlait de chasteté pastorale : une distance qui n’est pas extériorité
Son héritage réside également en des mots importants de mon ministère. Xavier parlait de médiation, cette médiation si utile pour réconcilier et faire vivre la communion. Il évoquait aussi la chasteté pastorale pour vivre une distance qui ne soit pas extériorité dans le rapport avec les gens. La finitude était aussi un thème important pour rester dans une logique d’incarnation et d’attention à la réalité. Mais le mot qu’il a peut-être le plus développé est celui d’humanisation pour que la divinisation baptismale s’extériorise, pour que la foi se développe en amour, amour qu’il a lui-même vécu dans la souffrance, en nous invitant à ne pas aimer la souffrance.
« Xavier Thévenot m’a donné le sens de la proximité, de l’écoute, de l’humanité »
Son héritage se manifeste aussi à travers des trilogies qui nourrissent ma réflexion. Il aimait dire qu’il fallait circuler dans les mystères du rosaire pour aider les gens à ne pas se complaire dans un état, circuler dans la Trinité pour vivre les relations d’une manière différenciée (en famille, dans le travail, dans l’Église). Il invitait aussi à circuler dans le Triduum pascal pour apprendre à traverser chaque épreuve personnelle ou pastorale moins comme un travail de deuil qu’un travail de Pâques. Il en était encore de même pour les vertus théologales (foi, espérance, charité), ainsi que pour le vrai, le beau, le bon. Mais son apport le plus décisif aura été celui de l’articulation entre les trois dimensions de la morale : l’universel, le particulier et le singulier. Il circulait entre les principes généraux universels, les normes morales et la prise en compte de la personne singulière.
Avec lui, j’ai appris qu’une morale est toujours en situation
Son héritage se présente ainsi comme des repères de morale, repères dont il avait compris la nécessité pour redire le rôle de la conscience et celui de la loi (notamment la loi naturelle). Avec lui j’ai appris qu’une morale est toujours en situation pour ne pas être une morale de situation, qu’une sainteté pastorale se vit avec ses imperfections. Là aussi il utilisait des trilogies : trois interdits fondamentaux (fusion, meurtre, mensonge) ; trois fonctions de la sexualité (relationnel, procréatrice, plaisir) ; trois rocs du réel (espace, temps, sexe).
Son dernier héritage est celui de dire la joie… alors qu’il n’en débordait pas ! Mais justement il m’a ainsi appris à parler aussi de ce qu’on n’éprouve pas : l’homme raisonnable sait dépasser sa propre expérience.
En 2003, lorsque je fus nommé évêque, il me donna un conseil que je n’ai pas oublié : « Demande deux dons au Seigneur : celui d’une parole libre que nul ne peut enchaîner et celui d’une infinie miséricorde envers ton presbyterium ». Autrement dit… Xavier m’a donné le sens de la proximité, de l’écoute, de l’humanité, et finalement de l’action de grâce, celle qui permet déjà de vivre en « ressuscités avec le Christ » (Col 3,1).
Hervé Giraud,
évêque de Soissons, Laon et Saint-Quentin
3 juillet 2014
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Don Bosco Aujourd’hui rend hommage à Xavier Thévenot.
Il y a dix ans, Xavier Thévenot, docteur en théologie morale, quittait ce monde. Don Bosco Aujourd’hui rend hommage à ce grand théologien et humaniste salésien en donnant la parole à quatre de ses anciens étudiants, leur demandant l’héritage qu’ils estiment avoir reçu de Xavier Thévenot, leur posant également la question de la pertinence de son message pour aujourd’hui. Parmi ces étudiants, trois sont actuellement à leur tour théologiens moralistes, Philippe Bordeyne, Geneviève Medevielle, Catherine Fino. Le quatrième est l’évêque de Soissons, Laon et Saint-Quentin qui a répondu plus spécifiquement à la question de l’apport de la théologie morale de Xavier Thévenot pour la conduite pastorale d’un diocèse. DBA leur donne tour à tour la parole.
Le dossier est coordonné par Joël Drouin, fma.
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