A Kenitra : Don Bosco au Maroc

21 octobre 2016

Parmi les écoles de la province salésienne de Don Bosco de France et Belgique, l’une d’elle se trouve au Maroc. Près de 400 élèves étudient à l’école Don Bosco de Kenitra.

Comment l’esprit de Don Bosco rayonne-t-il dans un pays musulman ?

Si vous êtes perdu à l’autre bout de la ville et que vous demandez : « Savez-vous où se trouve l’école Don Bosco ?  » les passants vous répondront tout de suite. Pourtant, Kenitra est une grande ville. Une ville moderne, en pleine expansion. Des immeubles se construisent sur des dizaines de kilomètres autour du centre. Une ville de contrastes aussi : en dépit de sa modernité apparente, il n’est pas bon pour une femme de se vêtir à l’occidental. La culture musulmane est bien ancrée.

L’école Don Bosco est une institution à Kenitra

Le visage de Don Bosco apparait sur un grand bâtiment blanc dans la rue Mohamed Abdouh. Le logo rouge s’affiche, immense. Et dès le préau, sur les murs, des centaines de fiches d’inscriptions aux ateliers culturels et sportifs donnent le ton. Des couleurs partout, des cris, de la joie. Pas de doute. On est bien chez Don Bosco.

Entouré par les enfants, le Père Antonio Vega, directeur de l’établissement, accueille les nouveaux venus. Il connait par cœur son histoire « L’école existe depuis 1937, explique-t-il. Après l’indépendance, en 1956, les Pères ont redéfini l’orientation de l’établissement et ont créé des formations professionnelles qui répondent aux besoins du pays. Aujourd’hui nous avons plus de mille deux cent jeunes dans l’établissement. »

Les cours en français et en arabe coexistent à égalité

L’école offre une scolarité en accord avec les programmes officiels : les cours en français et en arabe coexistent à égalité, les enseignants sont tous musulmans, les cours d’islam sont obligatoires. Sauf pour les trois élèves chrétiens de l’établissement. Nous sommes loin d’une école catholique européenne. Le charisme salésien se diffuse néanmoins par la présence constante du directeur au milieu des jeunes. Il n’est pas une récréation sans le voir sur la cour. Pour le directeur adjoint chargé du collège, Nouâman Haddouch : « parmi tous les mots de la pédagogie salésienne – qu’il connait par cœur- celui de la présence est le plus marquant ici ».

« On parle facilement de Don Bosco » et les mots du matin sont essentiels.

Pour le directeur, le Père Vega, le moment le plus important est le mot du matin. « Ce matin nous avons parlé de la réponse à la violence reçue par la non-violence. J’ai cité une phrase du Coran qui parle du pardon : tu dois te protéger de la violence. Tu dois pardonner. » Il ajoute « Nous prenons parfois des phrases du Coran, mais nous ne citons jamais la Bible en citant les sources. Nous choisissons des phrases de Jésus qui ont une portée universelle, nous ne disons jamais que c’est de lui. Nous ne pouvons pas parler de Jésus mais nous parlons plus facilement de Don Bosco. »

ECAM

L’école Don Bosco fait partie d’un réseau d’écoles catholiques du Maroc Nord : l’ECAM, (Enseignement Catholique au Maroc) réseau de 15 écoles, soit 11 000 élèves. Un projet éducatif commun les réunit. Le thème de cette année est : « Non à la violence, dans nos familles, dans l’école, dans la rue, sur notre terre. »

Cette année, le Père s’est appuyé sur le thème proposé par l’ECAM pour développer un programme d’année : « non à la violence ». Ce thème nourrit toutes les actions éducatives de l’école : sensibilisation des parents, formation des enseignants, ateliers pour les enfants, conférences. Dans le guide de rentrée scolaire distribué à tous les parents, par exemple, il encourage l’esprit de dialogue au sein des familles. « Le dialogue ne signifie pas faiblesse » est-il écrit. « Une juste fermeté doit éduquer les enfants à l’obéissance et au respect ». Ce livret est une mine d’idées, de rappel des points clés salésiens et des ressources pédagogiques.

Une semaine culturelle permet d’ouvrir sur la pédagogie de Don Bosco

Chaque année, le Père Antonio Vega organise une semaine d’ateliers appelée « La semaine culturelle ». C’est ce temps où les parents comme les enfants peuvent découvrir la pédagogie et la vie de Don Bosco. Tandis que les enfants font des jeux en lien avec l’enfance de Don Bosco, les adultes, parents et enseignants, vont aux conférences pédagogiques. Le Père Jean-Marie Petitclerc, cette année, est venu parler de son livre : « Les Douze mots clés de la pédagogie de Don Bosco ».

Des enseignants se disent salésiens et musulmans

Pour souder l’équipe enseignante autour des repères de la pédagogie de Don Bosco, le Père Véga n’hésite pas à s’appuyer sur les compétences et le charisme de professeurs qui sont imprégnés de ces valeurs. C’est le cas de Mohamed Habhoud, professeur d’arabe, musulman, poète à ses heures et passionné par Don Bosco. Selon lui « L’esprit de Don Bosco peut être chez les juifs, les chrétiens, les musulmans. L’ouverture c’est Don Bosco.»

Mohamed travaille dans cinq écoles dans les environs, où il intervient comme formateur coordinateur. Son comportement surprend ses collègues. Quand ceux-ci cherchent à connaitre ses recettes, il parle de la joie et n’hésite pas à parler de Don Bosco « J’agis, je pense en salésien. Je suis salésien musulman ! ». Il est l’auteur d’un livre sur Don Bosco en langue arabe que le directeur a fait publier pour le distribuer à tous les parents l’année du bicentenaire de sa naissance.

L’école est ouverte sur le quartier grâce à ses activités sportives et culturelles

Pour donner une idée du travail réalisé par l’établissement, il faudrait citer encore les nombreux projets qui font le lien entre l’institution et le quartier : le centre culturel et sportif ouvert aux jeunes qui ne fréquentent pas l’école, la bibliothèque pour tous, le cours Passerelle ouvert gratuitement pour les enfants déscolarisés, la salle de sport Don Bosco utilisée par toutes les associations sportives locales.

La multiplicité des projets donne un rayonnement évident à l’Institution Don Bosco. Entre ces trois directeurs, l’école, le collège, la JUK-CFF et la JUK-SPEL, une vraie complicité existe entre chrétiens et musulmans. C’est un roc solide, qui donne à l’Institution de Kenitra au-delà des divergences confessionnelles un vrai esprit de famille.

 

Joyeuse Union de Kenitra
Une formation post bac

En face de l’école et du collège se trouve l’établissement de formation pour les jeunes adultes dirigé par le Père Isidore Mbokalo, prêtre salésien originaire de République Démocratique du Congo : la JUK SPEL (Joyeuse union de Kenitra) spécialisée en électricité industrielle (équivalent BTS). On y encourage les élèves à prendre des initiatives : journée d’accueil organisée par eux, formation à la médiation, pédagogie par projets. Dans l’école JUK CFF, située à quelques mètres, Fatima Amhaouch déploie, elle aussi, une énergie formidable pour que les étudiantes reçoivent une formation de qualité aux métiers de la petite enfance. A la sortie de leurs études, il n’est pas rare qu’elles prennent la responsabilité d’une classe.

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