La Providence selon Don Bosco | Zélie

29 mars 2025

La Providence selon Don Bosco | Zélie

La confiance en la divine Providence est très présente dans la vie de saint Jean Bosco, prêtre italien du XIXe siècle (photo). Le Père Xavier Ernst, salésien de Don Bosco et curé de la paroisse Saint-Jean-Bosco à Paris, répond aux questions du magazine chrétien Zélie à ce sujet.

Père Xavier Ernst.

Zélie : Qu’est-ce que la Providence ?
Père Xavier Ernst : La Providence, c’est un synonyme du nom de Dieu. On l’appelle Dieu Miséricorde, Dieu Tout-puissant, Dieu Infini, Dieu Amour… et aussi Dieu Providence.


La relation entre Don Bosco et la Providence n’était-elle pas première dans sa vie ?

Je nuancerais : si c’était le cas, il aurait pu fonder un ordre dont le nom serait en lien avec la Providence. Or, il a fondé les salésiens – en référence à saint François de Sales -, et les filles de Marie auxiliatrice.
Cependant, Don Bosco avait une grande confiance en Dieu, dans un abandon complet et un lâcher-prise total. En même temps, il était très entreprenant dans de nombreux domaines, auprès des jeunes, en particulier les plus pauvres.
Il croyait à cette mission, car il avait confiance en Dieu, en vue du salut des personnes. Il transmettait aux jeunes la confiance en la Providence, les invitant à se tourner vers Dieu. Pendant que Don Bosco sillonnait les routes d’Italie et même de France pour récolter des fonds, les salésiens et les jeunes priaient pour la réalisation de ces œuvres.

 

Pourtant, dans la vie de nombreuses personnes, les grandes difficultés ne pourraient-elles pas faire douter de l’action de la Providence ?
En effet, la vie n’est pas sans épreuves. Don Bosco a rencontré des obstacles pour trouver des terrains pour les jeunes, pour des centres de formations ou pour la construction d’églises telles que la basilique Marie-Auxiliatrice à Turin. Certains sont allés jusqu’à porter atteinte à sa personne ! Mais Don Bosco a effectué une relecture et a vu que la Providence est intervenue, parfois de manière très « providentielle » comme avec ce mystérieux chien, « Il Grigio », qui est apparu et l’a sauvé d’un guet-apens à plusieurs reprises. Don Bosco a dit lui-même que c’est la Providence qui s’est manifestée par ce chien !
Dans la difficulté financière, Don Bosco commençait certains projets sans un sou, mais il savait que c’était un projet de Dieu ; et là, bien souvent, une enveloppe avec de l’argent arrivait, une personne qu’il rencontrait donnait la somme nécessaire !
C’est vrai, la foi passe par la croix. Elle n’empêche pas les épreuves et les difficultés. Mais après la croix, il y a la résurrection.

 

Malgré tout, certaines personnes semblent n’avoir aucune chance dans la vie, jusqu’au bout…
C’est vrai, c’est la fameuse question : « Pourquoi cette épreuve lui arrive à elle, et pas à moi ? » On ne sait pas. Comme le dit une histoire humoristique, il y a toujours une personne triste à Lourdes : c’est celle qui arrive après une personne qui vient d’être guérie. Elle soupire : « Il n’y aura pas deux miracles d’affilée ! ».
Cependant, bien des personnes sont passées par d’énormes épreuves et ont gardé la foi chevillée au corps et au cœur. Dieu n’envoie pas les souffrances. À ceux qui lui demandaient où était Dieu à Auschwitz, le pasteur Dietrich Bonhoeffer disait : « Dieu est avec tous ceux qui sont exterminés ». Paul Claudel affirmait également : « Dieu n’est pas venu supprimer la souffrance, il n’est pas venu l’expliquer, mais il est venu la remplir de sa présence ». Qu’on le ressente ou non, Dieu est à nos côtés dans l’épreuve.


Dans la vie de Don Bosco ou de Mère Teresa par
exemple, la Providence semble se manifester de manière visible, notamment quand arrive un don dans une enveloppe, contenant la somme manquante, comme vous l’avez souligné. Et nous, est-ce que nous sommes capables de relire ces signes de la Providence ?
Oui ! Dans ma vie, je peux lire de nombreux clin-
Dieu de la Providence. Je pense à mon histoire vocationnelle par exemple. Ou encore, nous, les salésiens de Don Bosco, avions un projet en Belgique et nous nous interrogions : « Est-ce que nous continuons, est-ce que nous arrêtons ? » Une somme que l’on n’attendait pas est arrivée ; cela a redonné de l’élan au projet !
Don Bosco ne faisait pas qu’attendre des enveloppes
tombées du ciel. Il se fatiguait pour chercher de l’argent, aller voir des notables… « Aide-toi, le Ciel t’aidera ! », selon le dicton. « Faites tout ce que vous pouvez, Dieu fera ce que nous ne pouvons pas faire », aimait répéter Don Bosco.
La façon dont Dieu conduit les choses, ou non, fait partie du mystère de Dieu. Une conviction de Don Bosco était que Dieu accompagne le cours des choses vers le bien. Il peut toujours tirer du mal un bien, comme la résurrection après la mort. Parfois aussi, Dieu répond différemment de ce qu’on attendait. Il arrive qu’on abandonne certains projets, car il n’y a pas d’enveloppe « miraculeuse ». Il faut faire une entière confiance en Dieu, et en même temps être réaliste, comme y invite Jésus en disant qu’avant de construire une tour, il faut calculer si on a de quoi la terminer. Il faut un peu de ces deux aspects, confiance et action. C’est le côté paradoxal de notre foi.
Comment discerner les signes de Dieu dans nos vies ?
Je pense qu’il n’est pas facile de les voir seul, il vaut mieux être accompagné – de manière saine bien sûr. On les discerne également dans la prière.

Dans l’évangile de saint Matthieu, Jésus affirme « Regardez les oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils n’amassent pas dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit ». Faudrait-il donc ne pas prévoir le lendemain ?

Cette parabole invite à garder l’émerveillement devant les choses, sans désir de maîtrise et de toute-puissance. L’oiseau du ciel, son essentiel est de chanter. L’être humain, son essentiel est d’aimer et de se laisser aimer. Nous sommes plus riches de nos relations que de nos possessions. Ce sont d’ailleurs les relations ajustées qui permettent de dépasser bien des problèmes.La spiritualité des salésiens de Don Bosco met-elle en avant la confiance en la Providence ?
Elle cherche un équilibre entre ce qu’on réalise, et ce que Dieu fait. Telle Jean Bosco, funambule à l’âge de 9 ans, notre spiritualité veut éviter à la fois de tomber, d’un côté, dans une confiance en la Providence qui serait aveugle et inactive, ni, d’un autre côté, dans une hyperactivité sans pleine confiance en Dieu.

Pour ce Carême, avez-vous un conseil concret pour augmenter notre confiance en la Providence ?
Au début du Carême, on peut préciser son essentiel, sa priorité. Par exemple, rencontrer l’âme sœur, ou trouver un travail. Pour Don Bosco, l’essentiel, c’était le service des jeunes – pas l’enveloppe d’argent pour elle-même. On peut faire ce qu’on peut en vue de cette priorité : si on reste fermé sur soi par exemple, la Providence ne pourra pas nous aider. Après les 40 jours de Carême, on pourra relire la manière dont on a été rejoint par la Providence dans cet essentiel. Il y a ce qui relève de notre ressort, et ce qui relève de l’action de Dieu.
Saint François de Sales nous dit que si notre agenda est très rempli, c’est qu’il faut mettre le même temps en plus pour la méditation ! Car il faut les deux : prier et agir. Dans notre emploi du temps, mieux vaut fixer le temps pour nos propres forces, mais également le même temps pour la prière et la confiance en Dieu.

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